Une initiative populaire pour interdire l’écriture inclusive en Suisse… on en parle ou pas ?

Ce weekend, je tombe sur un encart dans le Journal de Cossonay qui attire toute mon attention : « Notre langue française est en danger !* NON à l’écriture inclusive !* » Le petit astérisque renvoie à la phrase suivante « DLF-Suisse lancera prochainement une initiative populaire pour interdire l’écriture inclusive en Suisse ! » Non, vraiment ?

Pour combler mes lacunes, je commence mes recherches. Je découvre que DLF signifie Délégation à la Langue Française ; qu’elle est rattachée à la COLANG (Commission langues et échanges) qui œuvre en tant que conseillère pour la CIIP (Conférence Intercantonale de l’instruction publique de la Suisse Romande et du Tessin).

Je vous passe ici les organigrammes et autres liens que je vous mets à la fin de cet article, histoire d’essayer de garder le focus sur mon sujet principal. Je finis par trouver les domaines d’activités de la DLF qui sont la diversité linguistique, l’orthographe et la rédaction non discriminatoire. Un début de réponse… ? Pour le savoir, je clique sur l’onglet « Écrire sans discriminer » pour me rendre compte que :

« La DLF a reçu un mandat de la CIIP entre 2008 er 2010 de mener une recherche autour de la rédaction non discriminatoire, autrement dit le fait de tenir compte de manière équitable, lors de la rédaction d’un texte, du genre sexuel des personnes dont on parle ou à qui l’on s’adresse, dans le respect des normes scripturales du français. »

OK, je me dis que, tout compte fait, cette histoire est plutôt bien partie!

Pour aller plus loin, je suis renvoyée sur le site de l’OPALE qui a publié, en 2017, une note sur les pratiques d’écriture inclusive. Article dans lequel on apprend que :

« L’Opale invite ainsi chacun à utiliser systématiquement les formes lexicales et grammaticales propres à traiter de manière égalitaire les femmes et les hommes, favorisant ainsi une meilleure cohésion sociale. »

La rédaction épicène est encouragée (je reprends des couleurs!); le métier d’une femme ou d’un ensemble de femmes sera désigné par des termes au féminin (super!); les formes doubles (du type, les voyageuses, les voyageurs) qui désigne un caractère mixe est recommandé (bien!)… mais à contrario, le point médian ne sera pas utilisé dans les actes administratifs par faute de place et parce qu’il complexifie l’écriture et nuit à la lisibilité des textes.

Sérieux ? Arrivée à ce point de mes recherches, je me dis que la DLF souhaite lancer une initiative populaire pour interdire l’utilisation du point médian, car il manque de la place dans les actes administratifs !?! Je résume, mais je suis sans voix…

Par un rapide coup d’œil à l’histoire de la langue française (références à deux livres d’Eliane Viennot) on comprend à quel point le lexique, les mots et une langue évolue en fonction de son histoire, des besoins de la société et des idéologies qui les marque ! Quand on prend conscience que la masculinisation du français a été réfléchie, voulue et souhaitée, il serait grand temps d’observer notre société actuelle et d’y voir une plus grande volonté d’équité entre les femmes et les hommes …  L’écriture inclusive et le langage épicène sont des aspects d’un changement qui est déjà en route !

Affaire à suivre …

Pour plus aller plus loin:

  • Eliane Viennot : Non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin ! Petite histoire des résistances de la langue française
  • Eliane Viennot : Le langage inclusif : pourquoi, comment

5 réflexions au sujet de « Une initiative populaire pour interdire l’écriture inclusive en Suisse… on en parle ou pas ? »

  1. DLF-Suisse - Aurèle Challet, président

    Chère Madame,

    Après votre article fantaisiste, pour le moins et en vous laissant un message et un commentaire… par ce moyen « moderne » , j’espérais, comme président de DLF-Suisse avoir un retour.
    Je pensais utile de vous signaler que votre confusion désagréable (mais pas anodine) au sujet des « DLF » méritait au minimum un éclaircissement pour vos lecteurs-suiveurs… faussement informés !
    Je vous redonne mes coordonnées :
    DLF-Suisse
    Aurèle Challet, président.
    dlfpourlasuisse@gmail.com
    Tél. 079 873 10 16.

    Je reste donc à votre disposition pour vous permettre de vous renseigner correctement.

    Avec mes bons messages.

    Aurèle Challet

  2. Gaëlle, fondatrice de rectoverso

    Bonjour Monsieur,

    Je viens de répondre à votre message par mail privé, mais je souhaite quand même apporter une précision quant au fait que, selon vous, j’induis mes lecteurs et mes lectrices en erreur!

    De mon côté, je suis arrivée à privilégier l’écriture inclusive et le langage épicène:
    – suite à la lecture des ouvrages de Eliane Viennot, professeure émérite de littérature française de la Renaissance et membre de l’Institut universitaire de France (qui a écrit: « non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin » et « le langage inclusif: pourquoi, comment? »)
    – en consultant des études réalisées par les Universités de Lausanne et de Neuchâtel sur le sujet, dont un petit film très bien réalisé par l’Université de Neuchâtel qui nous présente en quelques minutes les tenants et les aboutissants d’une écriture non discriminatoire https://www.youtube.com/watch?v=uzHLEs08oGo&feature=youtu.be
    – et grâce à une formation sur le sujet donnée par l’association Décadrée: https://decadree.com

    Après avoir fait une synthèse de toutes ces informations, j’en suis arrivée à la conclusion que cette façon d’écrire rejoint mes valeurs d’équité entre les femmes et les hommes et je souhaite donc faire connaître mon avis sur le sujet sans forcément faire du prosélytisme et non pas, comme vous le suggérez, d’entretenir une » confusion désagréable ».

    Je pense que chacun et chacune peut se faire une opinion et opérer un libre choix dans sa façon d’écrire. Je laisse mes lecteurs et mes lectrices choisir leur mode de communication privilégié.

    En vous souhaitant une bonne continuation, je vous salue cordialement,

    Gaëlle Pizzotti

  3. Sylvain Pitton

    C’est une histoire de fous ! Dois-je dire de fous et de folles ?
    Le neutre existe : c’est le masculin !
    Comme la pensée woke ravive le racisme, l’écriture inclusive ravive le sexisme en mettant du genre partout, y compris là où il ne devrait pas y en avoir ! Artisane est un joli mot, artisan.e, ce n’est pas beau, c’est triturer la langue !

  4. Gaëlle Pizzotti

    Bonjour Monsieur! Je vous remercie pour votre commentaire, dont je ne partage toutefois pas le contenu. Dans la langue français, il existe bien deux genres: le masculin et le féminin. La problématique, selon moi, est que le masculin est utilisé autant dans le sens spécifique (le masculin se réfère ici à un ou plusieurs hommes) que dans le sens générique (le masculin représente tous les membres d’un groupe mixte). A l’heure actuelle, les recherches s’accordent à dire que le sens spécifique de la forme grammaticale masculine domine notre compréhension. Ce qui a pour conséquences que les personnes qui forment un groupe doivent spécifiquement être nommées afin que notre cerveau en fasse la différence.
    Comme le souligne très bien, le document « Les Mots de l’Egalité » produit par l’Université de Lausanne, « il ne s’agit pas d’une démarche visant à un « diktat » du langage, mais bien de favoriser une évolution du langage calquée sur celle d’une société qui vise l’égalité entre femmes et hommes. »

  5. DLF-Suisse - Aurèle Challet, président

    Madame Pizzotti,

    Vous démontrez une belle curiosité doublée, semble-t-il, d’un réel intérêt pour la langue française.

    Avez-vous entendu parler, en bonne suiveuse :

    – d’une directive officielle émanant de Chancellerie fédérale

    – de l’acceptation de la notion Roduit au Conseil national

    – des décisions des cantons de Genève et du Valais

    qui ont clairement décidé de proscrire, désormais, l’écriture (dite) inclusive dans tous les documents officiels ?

    A noter que le Gouvernement vaudois s’apprête à suivre cette même logique. Il a promis une réponse rapide à notre intervention, en parallèle de la notion Labouchère…

    La décision du lancement d’une initiative populaire fédérale, par Défense de la Langue française, qui est imminente, devient indispensable pour statuer sur une dérive de minoritaires sectaires.

    Si vous souhaitez avoir plus d’informations ou des copies desdites décisions, je reste à votre disposition.

    La langue française peut tout à fait évoluer… Oui ! mais surtout sans être triturée, devenir illisible et donc incompréhensible pour plus de 500 millions de locuteurs par le monde ! On n’a jamais rien simplifié en compliquant d’avantage…

    Avec mes messages francophones les meilleurs.

    Aurèle Challet – DLF-Suisse

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